#TousAuBistrot – Quand aller au bar signifie tellement plus

Si vous n’avez pas vu cette vidéo maintenant, vous le ferez.

C’est le lendemain des attentats de Paris, et un père et son fils discutent avec un journaliste pour Le Petit Journal. Le fils, c’est compréhensible, croit « il faut changer de maison » – nous devons changer de maison, déménager. Son père lui assure qu’ils n’ont pas à déménager. « La France est notre maison. Encore une fois, de manière compréhensible, le petit garçon note que les « méchants » ont des armes, ce à quoi le père répond « ils ont peut-être des armes, mais nous avons des fleurs ». Une fois de plus, le garçon résiste. « Mais les fleurs ne font rien. » Le père, très gentiment, le corrige. « C’est pour lutter contre les armes à feu. »

Hors contexte, cela peut sembler une phrase sentimentale ou facile, quelque chose d’innocemment pacifique mais peut-être trop optimiste dans l’état actuel du monde. Sauf que cette phrase est spécifiquement, obstinément appropriée à cet état du monde. Et ce père et ce fils, comme tant de Parisiens et de Français, se sont montrés. Comme Alexandre Cammas, fondateur du Fooding, a déclaré au New York Times« Ce qui fait que Paris a été attaqué et blessé… C’est très important que Paris se relève, vite, et continue d’être Paris. »

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Cette capacité – à se présenter – est profondément ancrée dans cet état de fait. « Nous sommes tous inquiets ici, même si nous essayons d’être courageux », nous a dit la Parisienne Baptiste Bonhomme. Cinq de ses amis étaient au Carillon, le bar de plongée du 10e arrondissement qui a été attaqué par un tireur lors de la deuxième série d’attaques de vendredi soir, dont Le Petit Cambodge, un restaurant de quartier cambodgien tout aussi apprécié et totalement inoffensif à proximité. Les attaques, comme nous le savons, ont continué. Au moins 129 personnes ont été tuées et des centaines d’autres blessées.

Les amis de Bonhomme ont survécu, mais quelque chose dans l’idée du tissu social a été profondément rompu, une blessure rapidement si cautérisée de manière inefficace par les avertissements du gouvernement de rester à l’intérieur et d’éviter de se rassembler. Sauf que se rassembler fait partie de l’esprit central de la culture parisienne. Une interdiction ne durerait pas. « La France a des valeurs importantes, dit Bonhomme. « L’un d’eux est ‘l’art de vivre' », c’est-à-dire savoir vivre, un art que les Français ont perfectionné et, heureusement, transmis en partie au reste d’entre nous. « Après les attentats, il était important de retourner dans les cafés et surtout les terrasses, car c’est une façon de montrer aux terroristes qu’on n’a pas peur. »

Bonhomme n’est pas seul non plus. En fait, tout le contraire. Un cri de ralliement se répand à Paris, et dans le monde entier : « Tous au bistrot ! », ou « Tous au bar ! Il y a même des hashtags Twitter en cours d’exécution, #tousaubistrot et #jesuisenterrasse (qui signifie « je suis assis dehors »). En règle générale, un appel au bar est fait avec un certain sentiment de convivialité ivre ou une insistance fâchée de la fille d’anniversaire. Ici, c’est un acte de défi vital. Bien sûr, l’idée d’aller dans un bar et de prendre un verre de vin entre amis n’a jamais été destinée à être un acte de réponse culturelle agressive. C’est sa pure beauté mondaine qui le rend si parisien – un rituel ancré dans la culture des cultures, où la détente est un art et le vin un fil conducteur, la fluidité joviale d’une vie paisible.

Mais dans le contexte moderne, que nous nous efforçons tous de définir, le fait d’un bourdonnement cool et apaisant, ou la mélodie facile de «l’art de vivre», n’est pas de la frivolité, c’est de l’humanité. « Le vin est central. Pas parce que vous voyez une bouteille de vin sur les tables de chaque café. Mais c’est une passion », dit Bonhomme. « Un symbole et un simple plaisir de vivre. Le vin fait si intimement partie de notre civilisation.

Comme offrir des fleurs.

A la fin de la vidéo, le garçon a enfin été réconforté et compris. « Les fleurs et les bougies sont là pour nous protéger. » Les fleurs peuvent se faner, bien sûr. Mais ils grandissent. Tout comme les vignes. Pas les armes à feu.